Football: au tribunal Riolo contre Deschamps, l'ombre de la lésion de Benzema

Football: au tribunal Riolo contre Deschamps, l'ombre de la lésion de Benzema

Le commentateur Daniel Riolo comparaissait jeudi pour diffamation et les réquisitions ont appelé à sa condamnation après avoir traité en direct le coach des Bleus Didier Deschamps de "menteur" concernant la lésion de Karim Benzema, absent in extremis pour la Coupe du monde 2022.

Quatre jours suivant le succès 3-1 des Bleus face à l'Azerbaïdjan pour boucler les qualifications à la Coupe du monde 2026, le cadre change radicalement. Expression sérieuse, tenue grise, Didier Deschamps s'est présenté à la XVIIe chambre du tribunal correctionnel de Paris suite à sa plainte pour "diffamation" et "atteinte à l'honneur". Après une séance marathon de cinq heures, la décision est en délibéré et sera prononcée le 30 janvier 2026.

Le motif: trois segments de l'émission "L'After Foot", le talk-show quotidien sur le football, diffusée sur RMC de janvier à mars 2023.

L'avocate de Didier Deschamps, Me Isabelle Wekstein, s'est offusquée que le spécialiste sportif ait reproché au sélectionneur d'avoir "caché intentionnellement la réalité au monde entier sur le retrait de Karim Benzema" juste avant le coup d'envoi de la Coupe du monde au Qatar.

Impossible de tolérer

D'autres déclarations visées accusaient le sélectionneur des Bleus d'être impliqué "dans toutes les histoires troubles du football français", en mentionnant par exemple l'affaire de corruption VA-OM de 1993 ou le cas de dopage à la Juventus Turin en 2010.

"Il m'est impossible de tolérer ces déclarations qui nuisent à mon intégrité et à mon honneur", a affirmé Didier Deschamps aux magistrats.

"J'entretiens de bons rapports avec les médias, je suis ouvert à l'examen, au débat, à des critiques sévères ou injustes, c'est dans l'ordre des choses. Je respecte la liberté de la presse tant qu'on ne glisse pas vers des attaques contre mon intégrité", a précisé le sélectionneur, qui assigne en justice un journaliste pour la première fois.

Daniel Riolo a défendu à la barre une "émission d'opinions" où il décortique quotidiennement l'univers du football devant 13,9 millions d'auditeurs (en direct et podcast), d'après Médiamétrie.

"Je n'ai pas accusé Didier Deschamps d'être mêlé à l'affaire VA-OM ou d'avoir dopé à la Juve. C'était une remarque générale", a-t-il clarifié.

Contrairement à son style habituel dans l'émission, il a affirmé avoir basé son éditorial où il traitait le sélectionneur de "menteur" sur des sources fiables.

"Lien conflictuel"

"Le docteur que j'ai consulté m'a indiqué que Benzema pouvait jouer, j'ai accompli mon rôle(...). Benzema mériterait d'être à ma place, cela semble davantage lié au lien conflictuel entre les deux personnalités", a-t-il poursuivi en évoquant un retweet du Ballon d'Or qualifiant de menteur le sélectionneur sur l'incident de la Coupe du monde au Qatar.

L'affaire de la lésion de Karim Benzema a été examinée en détail. Point de discorde: les circonstances du départ de l'avant-centre en novembre 2022, à trois jours du premier match des Bleus.

Le numéro 9 du Real Madrid avait dû abandonner le groupe pour une déchirure musculaire. Pourtant, il avait repris l'entraînement mi-décembre avec son équipe, relançant les débats sur la sévérité de sa blessure.

Convoqué comme témoin, le médecin des Bleus Frank Le Gall a soutenu son diagnostic et l'officier de sécurité Mohamed Sanhadji a confirmé que le départ de Benzema s'était déroulé "conformément aux procédures".

Didier Deschamps a maintenu sa version. "Le médecin revient avec Karim. Je me rends avec lui dans sa chambre. Et là, je découvre un joueur dégoûté, anéanti. (...) Karim me dit alors: +C'est fini+", a expliqué le sélectionneur, précisant avoir subi des menaces accrues après cet événement.

"Je suis choqué par les paroles de Riolo, il me transforme en nouvelle cible en affirmant des faits sans les vérifier", a-t-il argué.

Le parquet a requis la condamnation du journaliste, déplorant que "l'enquête n'ait pas été menée sérieusement" et que les propos aient été "lancés aux auditeurs sans filtre". Pour compenser son dommage moral, le sélectionneur des Bleus a réclamé un euro symbolique.